2023-09-28

Docteur, qu’est-ce qui me sort de la vulve ?

Par Dr. Nathalie Leroux

Tout ce que vous voulez savoir sur les prolapsus génitaux.

Qu’est-ce qu’un prolapsus?

Le prolapsus est la descente d’un organe au travers de la muqueuse vaginale chez la femme. Le prolapsus utérin est la descente de l’utérus. La vessie est située derrière la paroi antérieure du vagin et la protrusion de celle-ci vers le bas s’appelle une cystocèle. En contrepartie, le rectum (intestin) est situé derrière la muqueuse vaginale postérieure et la descente de celui-ci est appelée une rectocèle. L’entérocèle est le prolapsus des petits intestins.

Est-ce que tous les prolapsus doivent être traités?

Seulement les prolapsus symptomatiques devraient être pris en charge. Le but du traitement est d’améliorer la qualité de vie de la clientèle. Il arrive que des patientes soient envoyées en consultation suite à une visite médicale avec leur médecin de famille et qu’un prolapsus a été trouvé fortuitement lors d’un examen de routine. Dans ce cas, la condition de la patiente sera bien entendu évaluée mais puisque aucune plainte n’avait été rapportée au préalable de l’examen, la conduite est de rassurer la patiente. Aucun traitement n’est nécessaire.

Quels sont les symptômes associés au prolapsus?

Une bonne proportion des patientes sont asymptomatiques. Une des premières impressions est la sensation d’une lourdeur/pesanteur pelvienne. Une description typique est d’avoir l’impression de porter un tampon mal placé. D’autres patientes découvrent une masse vaginale à l’entrée du vagin lors d’une toilette vulvaire dans la douche. La masse ou boule est perçue avec les doigts mais peut être autrement non ressentie. Il est possible de ressentir un inconfort lors de relations intimes mais pas nécessairement. Des symptômes urinaires peuvent accompagner le prolapsus génital comme de la difficulté à initier la miction, de l’incontinence d’effort ou une vidange urinaire incomplète. Pareillement, les selles peuvent être plus difficile à évacuer dans le cas d’une rectocèle.

Quels sont les éléments à considérer dans le choix des traitements?

Tel que mentionner préalablement, le prolapsus doit être incommodant pour la patiente et que celle-ci désire corriger la situation. La condition médicale de la patiente doit également être pris en compte. Certains problèmes de santé (maladies cardiaques ou pulmonaires sévères) peuvent contre-indiquer l’approche chirurgicale. Il faut toujours garder en tête que l’indication de la chirurgie est d’améliorer la qualité de vie. Il ne s’agit aucunement de chirurgie obligatoire comme dans les cas de cancers. Pour les patientes pour qui la chirurgie n’est pas une option sécuritaire, il existe d’autre possibilité afin de diminuer l’ampleur des symptômes.

Le désir de grossesses est un élément important dans le choix de nos options thérapeutiques. Toute chirurgie devrait être envisagée une fois que le désir de fertilité est terminé.

Est-ce que cette masse vaginale peut être cancéreuse?

Il s’agit d’une peur légitime. La peur du cancer est une raison de consultation fréquente chez les patientes qui se découvrent une boule à l’entrée de la vulve. Une masse vaginale doit effectivement être investiguée et certaines peuvent être cancéreuses. Une fois cette évaluation faite par un professionnel de la santé, rassurez-vous le prolapsus génital n’est aucunement cancéreux. Il peut même être laissé comme tel selon la symptomatologie.

Quels sont les facteurs de risque du prolapsus des organes génitaux?

La grossesse et l’accouchement sont deux facteurs de risque qui contribuent au développement du prolapsus des organes pelviens (POP). L’accouchement vaginal peut causer des dommages directs aux muscles du plancher pelvien et aux attaches des tissus conjonctifs du bassin. De façon additive, le traumatisme des fibres nerveuses par l’étirement des tissus lors de l’accouchement contribue à la dysfonction du plancher pelvien. La césarienne pourrait être un facteur protecteur à court terme en comparaison avec l’accouchement vaginal. Cet effet protecteur se dissipe suite à des grossesses ou accouchements subséquents, diminue avec l’âge et disparait complètement chez la femme plus âgée.

L’indice de masse corporel (IMC) est un facteur de risque significatif en lien avec la prévalence du POP. Le surplus de poids abdominal crée une pression intra-abdominale exagérée sur le plancher pelvien comparée aux femmes ayant un poids santé. Comparées aux femmes non-obèses, les femmes obèses ont trois fois plus de chances d’avoir de l’incontinence urinaire. Encourager la perte de poids devrait être une option thérapeutique de première.

Une histoire familiale positive est possible pour les POP. Il existe des facteurs héréditaires sur la qualité des tissus conjonctifs.

Les maladies pulmonaires obstructives chez les femmes de plus de 60 ans augmentent significativement le risque de POP.

Est-ce que mon prolapsus peut nuire à mes relations sexuelles?

Bien que le POP puisse être perçu par le/la partenaire, sachez que la pénétration permet une réduction de celui-ci, c’est-à-dire qu’il sera repoussé vers l’intérieur. Ceci est en général non douloureux et ne devrait donc pas contrevenir à des relations sexuelles satisfaisantes. Pour certaines patientes, par contre, comme les tissus sont relâchés, les sensations durant les relations intimes peuvent être diminuées. Un des buts du traitement sera de redonner du tonus à vos muscles du plancher pelvien.

Qu’est-ce que je peux entreprendre afin de diminuer les symptômes associés à mon prolapsus

Les exercices bien connus sous le nom de Kegel sont en fait une activation et contraction volontaire des muscles du plancher pelvien. Ils peuvent contribuer à la limitation de la progression du POP et à la diminution de la pression/lourdeur pelvienne.

Un entraînement efficace des muscles pelviens peut améliorer et parfois complètement traiter des patientes avec POP léger à modéré. Il peut être difficile pour une patiente de contracter de façon isolée ces muscles. Certaines patientes contractent plutôt les muscles abdominaux. D’autres feront l’effort contraire, soit un Valsalva (l’effet de pousser). Dans ce cas, la symptomatologie pourrait même empirer suite au traitement. Il est estimé dans certaines études que jusqu’à 80% des femmes n’arrivent pas à reproduire une contraction adéquate des muscles du plancher pelvien. Bien que cette contraction puisse être bien exécutée pour certaines, le recrutement musculaire est lent et la force de contraction faible.

Une physiothérapeute spécialisée en rééducation périnéale peut vous accompagner dans l’entraînement des muscles de cette région qui sont parfois difficile à activer. Il est possible que l’on vous propose un traitement avec une sonde vaginale. Celle-ci vous permettra de voir l’importance de la contraction que vous développez durant votre séance d’exercices et vous permettra d’avoir de meilleurs résultats. Il est possible que plusieurs séances de physiothérapies soient nécessaires afin d’obtenir des résultats satisfaisants.

Qu’est-ce que la chaise Emsella?

Il s’agit d’une plateforme (chaise) qui est équipée d’une technologie de résonnance magnétique focussée de haute intensité. Vous êtes simplement assise sur la chaise, habillée et la résonnance magnétique vous amènera les muscles du plancher pelvien à se contracter. On dit de la contraction qu’elle est supra maximale et sa durée est soutenue. La force de contraction musculaire développée durant une séance est de beaucoup supérieur à ce qu’il nous est possible de faire individuellement. Il est également possible de maintenir cette contraction musculaire plus longtemps que ce ne que nous sommes pas en mesure de faire volontairement. Le tout sans douleur. On rapporte 65% d’amélioration de la symptomatologie chez les patientes traitées. Des résultats appréciables sont possibles après 6 séances (2 séances/semaines).

Qu’est-ce qu’un pessaire?

Un pessaire est une prothèse en silicone qui est insérée dans le vagin afin de soutenir les organes dans les prolapsus du plancher pelvien. Il existe plusieurs types et grandeurs de pessaire. Le succès du pessaire varie selon le degré de prolapsus et de plusieurs autres facteurs. Ce n’est pas toutes les femmes qui sont de bonnes candidates pour l’utilisation d’un pessaire. Celui-ci nécessite un nettoyage (retrait) qui vous sera enseigner. Dans le cas où la patiente n’est pas en mesure de procéder elle-même aux soins de son pessaires, cet entretien peut être pris en charge par un personnel infirmier en CLSC par exemple.

Comment savoir si je suis une bonne candidate à la chirurgie?

Votre spécialiste de la santé sera en mesure de bien vous conseiller en regard de votre symptomatologie, la gravité de votre prolapsus, de votre âge et ainsi que votre état de santé général. Il n’existe pas une chirurgie qui est bonne pour toutes. Chaque cas est individuel et l’approche dépend de plusieurs facteurs.

Est-ce que les chirurgies sont vraiment efficaces pour traiter les prolapsus du plancher pelvien?

Il existe plusieurs types de chirurgies pour traiter le POP. Certaines sont plus efficaces que d’autres et votre médecin pourra vous expliquer les nuances de chacune. Le taux de succès est rapporté dans la littérature à 70% à plus ou moins long terme. La récidive est dû à plusieurs facteurs individuels mais également en raison de la qualité des tissus conjonctifs qui sont plus faibles que la moyenne de par la pathologie (POP) en soit.

Est-ce que je dois absolument consulter un urogynécologue?

L’urogynécologie est une surspécialité entreprit suite à une formation spécialisée soit en obstétrique-gynécologie soit en urologie. Leur expertise est la chirurgie du plancher pelvien et donc la prise en charge complète du prolapsus du plancher pelvien et de l’Incontinence urinaire. Certains gynécologues en pratique général ont également les compétences nécessaires afin de vous proposer le même genre d’intervention. D’autres préféreront référer aux surspécialistes d’emblée. Il s’agit surtout que votre professionnel de la santé vous mette en confiance et soit à l’aise de discuter toutes les options thérapeutiques qui s’offrent à vous.

En résumé, il n’y a rien à faire si votre prolapsus ne vous embête pas et plusieurs alternatives existent si celui-ci vous pourri la vie!